PETIT ET MODESTE ESSAI SUR LES CROYANCES


Pardonnez-moi, je ne suis qu’un autodidacte. Cet essai ne repose donc que sur mon vécu, ma
curiosité et mon irrépressible envie de participer.
Pour bien me situer dans ce projet, je crois devoir vous faire part des fréquentations et des
influences que j’ai plus ou moins reçues en matière de croyance tout au long de ma vie. Bien
entendu la religion catholique a imprégné mon enfance. Très vite, grâce à l’influence
maternelle (ma mère étant beaucoup plus attirée par les aspects ésotériques de la religion
chrétienne) je fus en contact avec les martinistes, les spirites et l'exorciste du diocèse de Lille.
Dès l’âge de dix ans, je m’enflammais pour cette « Nouvelle Jérusalem » en dévorant la
littérature très particulière de maman. Inutile de vous dire que mes études en prirent un sacré
coup. Le mystère m’attirait mais je n’aimais pas son voile : le dogme. Je sentais bien que
curés, évêques, cardinaux (le cardinal Liénart dont j’ai croisé le chemin) n’étaient pas plus
avancés que moi (encore enfant) sur la profondeur du mystère.
Dès l’âge de seize ans j’ai donc décidé de m’enfoncer plus profondément sur le chemin
caillouteux des mythes et de leur contenu. Il y eût des rencontres, des initiations toutes
extraordinaires. Théologiens, séminaristes, alchimiste, voire même, un couple étrange de
sculpteurs tchèques dans la forêt de Paimpont (plus connue sous le nom de forêt de
Brocéliande, celle du fameux Merlin). Vaille que vaille et sans autre intérêt que de m’occuper
des clubs théâtre, cinéma, musique et parachutiste, j’ai fini par obtenir mon bac de technicien
en chaudronnerie(?). Tout le monde s’est demandé d’ailleurs ce que je pouvais bien faire dans
un lycée technique avec un 18/20 en philo, moi aussi !
J’entrepris donc de refuser les offres d’emploi (nombreuses parce que cette formation et ce
lycée étaient réputés en France comme à l’étranger) et d’entreprendre un voyage initiatique
très vaniteux : aller à la rencontre de Dieu (rien de moins). La logique m’a donc entraîné sur
les routes, chemins et déserts du Moyen-Orient et de l’Orient, sources principales des mythes,
croyances, religions et philosophies.
Mon premier étonnement fut de constater que la sincérité de ma quête ouvrait les portes les
plus dissimulées. Il en fut ainsi partout. Je découvrais que sous la croûte dogmatique des
religions du livre persistaient des croyances, des rituels et des cultes remontant jusqu’à
l’animisme. J’ai pu ainsi observer et, dans certains cas, être initié à des survivances (Apollon,
Eleusis, Mithra, tantrisme, Isis, Ishtar,…), débattre avec un philosophe soufi, avec des lamas
tibétains, des yogis (bien qu’avec eux cela se passe plutôt au niveau mental) ou des sadhus . Je
balbutiais sur la voie de la méditation transcendantale.
J’ai traversé des régions infestées de maladies sans le moindre vaccin, des zones
d’affrontement sans la moindre égratignure, des cols, des forêts, des montagnes sans la
moindre agression animale, végétale, sans faire la moindre chute. Nourri par une chance
incroyable, un optimisme démesuré et/ou orgueil qui ne l’était pas moins, j’ai fini par me
convaincre que la divinité m’attendait quelque part pour causer avec moi.
Inutile de vous dire que tout événement insolite prenait une dimension particulière. Et il y en
eût.
Bien entendu elle n’était pas au rendez-vous. Pourtant je suis allé jusqu’à faire deux NDE
(Near Death Experience) sous contrôle d’un médecin classique (mais passionné par les débuts
de cette observation « scientifique ») et par un lama médecin puisque cela se passait dans une
lamaserie tibétaine au Népal. J’ai tiré trois conclusions : il se passe des choses très
troublantes, elles vous changent , elles restent, à mon sens, purement physiologiques. Je
pense, en effet, que si le cerveau vient à manquer d’oxygène, il libère d’un coup tout son
arsenal de drogues (endorphines et autres). Cette libération semble avoir deux effets : un
sentiment « lumineux » de bien-être et une impulsion de tous les sens physiques distants (on
voit, on entend, on sent), seuls le toucher et le goût disparaissent (cela me semble être logique
car ils sont liés à la douleur). Enfin j’ai l’impression que les dernières ressources cervicales se
concentrent en un lieu situé à l’arrière (mais là c’est subjectif) et que s’exerce un balayage (à
la manière d’un phare) des états de mémoire ou d’oubli. On revoit sa vie et, principalement,
ce qu’on croyait en avoir oublié. Mais ce qui domine incroyablement au réveil c’est un
indescriptible état de croyance.
Bien entendu ces deux expériences furent de courte durée assorties d’une réanimation
problématique compte-tenu des moyens des expérimentateurs. Ces derniers furent déçus de la
relation de cette expérience. Au premier, je dis qu’il n’y avait rien d’autre qu’une sensation de
bien-être et à l’autre que je n’avais pas rencontré les monstres du bardô tôdôl et qu’il y avait
quelque chose de culturel dans les visions « post-mortem » qu’on pouvait avoir. Le plus
affecté fut le médecin occidental qui ne risquait pas de faire une communication avec ça. J’ai
compris que ça m’avait changé mais je n’ai pas compris pourquoi et dans quel but.
Je n’en parle qu’aujourd’hui, soit plus de quarante ans après, parce que, toujours aussi
curieux, les progrès de la science d’aujourd’hui décrivent des phénomènes que je pense avoir
vécu (si j’ose dire), le déplacement des neurones entre autres.
Sur le plan physiologique, ça colle assez bien mais pourquoi ce changement ? Pourquoi la
croyance prend-elle le pas sur les souvenirs, sa propre culture et ses dogmes ?
Une réponse s’est imposée à moi. Bien entendu elle n’engage que moi Mon intime conviction
est que la faculté d’abstraction est le dernier pilier du vivant. La pensée abstraite échappe à la
matière. Je ne pense pas qu’elle puisse agir sur elle directement même s’il m’a été donné
d’assister à des expériences troublantes. Par contre, indirectement, elle a stimulé la maîtrise de
celle-ci de Démocrite à Rutherford, de Pythagore à Einstein. Étions-nous le meilleur support ?
Pas sûr ! Peut-être que les dinosaures s’ils avaient survécu…Nous avons dépassé (pour
certains) le caractère inéluctable de la mort en inventant l’immortalité, en pensant qu’il y a eu
un avant la vie et qu’il y aura un après la mort. S’il en est ainsi, alors ! Pourquoi nous en
faire ? Simplement parce que rien ne vient nous rassurer là-dessus. Alors nous continuons à
fabriquer de l’abstraction..
Alors que j’écris cela, chez ma voisine des religieux sont là portant « la parole de Dieu »,
chantant des cantiques. C’est insolite… C’est ce que j’appelle le chaos déterministe . Nous
avons souvent le sentiment que tout est immuable alors que tout est en réalité chaos Nous ne
savons pas si un fou ne va pas déboucher sur la voie de gauche alors que nous roulons
paisiblement ou si, demain, une rencontre ne changera pas fortement le cours de notre vie
Pourtant nous attachons, que dis-je, nous nous enchaînons à ce que nous pensons être notre
destinée. Alors ! Nous nous en remettons à ceux que nous croyons être nos protecteurs
temporels et spirituels : le chef et le shaman, le roi et l'Église ou la Mosquée ou le Temple, la
Nation et tout ce qui précède plus la science et le directeur de pensée, etc… Tout cela sans
nous rendre compte que l’un comme l’autre de ces pouvoirs s’appuient sur notre profond
désir de croyance.
Tous les promoteurs d’une pensée et d’une conscience personnelle ont été durement réprimés,
châtiés et finalement détruits (gnostiques, cathares ) au profit de ceux qui s’emparent de notre
besoin d’abstraction. Pourtant les adages ne manquent pas : « Quand on le veut, on le peut »,
« Il suffit d’y croire pour que ça marche ». Il est patent que ceux qui « y ont cru » et se sont
obstinés, « contre vents et marées » sont parvenus à un résultat.
La pensée abstraite n’échappe pas à cette logique du vouloir mais elle n’évitera pas le chaos
ambiant. Par-dessus tout elle devra affronter la porte la plus lourde à ouvrir, celle qui nous
oblige à recréer des milliers de clefs : le soi. Celui qu’on cède si facilement à la conformité
ambiante, à ces pouvoirs évoqués plus haut Je ne suis pas loin de croire que la fameuse
« singularité », le big-bang, qui a créé notre univers visible, est le fruit de la rencontre
chaotique entre une pensée abstraite et une énergie potentielle dans un vide quantique. Après

tout, un verre d’eau plein est scientifiquement vide à 99,999999 %. CDAB

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